Quelle place pour la technologie BLOCKCHAIN dans le secteur des paiements ? - partie 2
Vous arrivez en cours de cycle ? Aucun problème ! Retrouvez le premier volet de l’article sur la Blockchain: un socle dans les cryptos-monnaies ! Quels sont les cas d’usages à valeur ajoutée dans le secteur des paiements ? La technologie blockchain quant à elle, a fait des adeptes. Quelques banques se sont lancé le défi de suivre la tendance pour capitaliser sur les gains d’efficacité que la technologie blockchain permettra. JP Morgan a été offensive et fait d’une pierre deux coups. C’est la première banque américaine qui a créé sa monnaie digitale basée sur une technologie blockchain [1]. Le JPM Coin permet le transfert d’argent instantané entre clients institutionnels. La valeur d’un JPM Coin est équivalente à celle de 1 USD, ce qui limite les variations et risques de spéculation. La valeur ajoutée de ce modèle réside dans un temps de traitement optimisé comparativement à un circuit bancaire plus traditionnel. La technologie blockchain présente donc un réel intérêt au cœur d’un secteur bancaire déjà à la pointe des innovations technologiques. Autre exemple, la Banque de France a réalisé le projet MADRE [2] afin de décentraliser le registre d’identifiants créanciers SEPA et ses attributions respectives (ICS qui a remplacé le Numéro National d’Émetteur (NNE) pour émettre des prélèvements SEPA). La gouvernance liée à l’attribution de ces ICS était problématique et couteuse en maintenance. Un business case robuste et un travail collaboratif avec les autres banques a permis d’automatiser l’ensemble du processus et de réduire les délais de traitement. Cette technologie blockchain présente donc l’intérêt de faire travailler en équipe à l’amélioration de processus existant. Dans cet écosystème le Trade Finance tire également son épingle du jeu avec plusieurs projets actifs. La blockchain tire les ficelles là où le paiement repose habituellement sur d’anciens systèmes techniques lourds et complexes. Métier traditionnel de la banque, le Trade Finance profite de cette rupture technologique pour dématérialiser quelques processus papiers, ou accélérer les contrôles de marchandises et faciliter l’accès au financement. Par exemple, plusieurs acteurs industriels et banques se sont entendus pour créer la société Komgo [3] afin de disposer d’une plate-forme blockchain destinée à digitaliser le financement du commerce des matières premières. Le Crédit Agricole quant à lui a testé auprès d’un groupe de collaborateurs une solution de transfert incluant une opération de change basée sur la blockchain. Le test a été effectué entre des comptes Crédit Agricole (Suisse et France) avec Ripple. Ici aussi le gain de délai est notoire : un paiement instantané grâce au réseau Ripplenet face à un virement en circuit classique. Du côté de nos voisins espagnols, la banque BBVA [4] a participé à un test de financement syndiqué via des protocoles DLT (Distributed Ledger Technologies) privés (Hyperledger) et publiques (Ethereum). Ce prêt syndiqué aurait été conclu avec BNP Paribas et la banque japonaise MUFG pour le compte la Red Eléctrica de España [5], une entreprise espagnole du secteur énergétique. Toutes les étapes sont ainsi enregistrées de manière transparente, un bon moyen de mettre la technologie blockchain au service d'instruments financiers, qui peuvent être autre chose que des transferts monétaires : sur Ethereum, les transactions peuvent être des échanges de valeur et / ou de données [6]. En conclusion Il est trop tôt pour savoir si les crypto-monnaies sont susceptibles de remplacer à terme des monnaies officielles, d’autant plus que le cadre juridique des cryptomonnaies et cryptoactifs est en cours d’analyse par différents gouvernements (Loi Pacte en France). Les banques centrales commencent à se saisir du sujet pour répondre aux enjeux d’une Europe harmonieuse en matière de paiements. L’avenir des crypto-monnaies va t il se construire autour des stablecoins ? L’écosystème de la technologie blockchain quant à lui a donc bien sa place au milieu des paiements et inspire confiance. La technologie blockchain n’a pas vocation à remplacer les moyens de paiements traditionnels, et n’apparaît pas comme une menace. Au contraire, elle s’inscrit dans un pari à long terme, idéal pour apporter un levier à la mise en place de services innovants ou complémentaires dans le monde des paiements et plus globalement aux instruments financiers [7]. Cependant, elle crée aussi une menace, car une fois le principe des crypto-monnaies établi, les banques devront potentiellement ajuster leur rôle et pourquoi pas se centrer sur l’humain et la relation client comme une valeur ajoutée en utilisant Fintech ou TechFin pour fournir le service de paiement. Ce modèle est tout à fait envisageable sur certains produits de niches (versement d’indemnisation, crédit à la consommation, prêt express...). Rappelons finalement que le futur des crypto-monnaies, comme toutes les solutions basées sur la blockchain, dépendra principalement de leur capacité à créer de la valeur pour l’écosystème financier, que ce soit en termes de coût de transaction, de rapidité, ou d’indépendance vis-à-vis d’acteurs hégémoniques. Emmanuelle Weisberg (PGE 03) et Michel Philippart |
Emmanuelle Weisberg (PGE 03) - Rédactrice Diplômée d’une Licence de Sciences économiques à PARIS XII, d’un MBA à NEOMA ainsi que d’un Certificat Advanced Commercial Lending Barclays, School Of Finance. Aujourd’hui membre du cabinet EJ2S elle a plus de 15 ans d’expérience dans le domaine de l’industries bancaire et de l’assurance. Elle est reconnue pour son expertise dans le domaine des moyens de paiement et de gestion du cash management. Michel Philippart - Relecteur / Correcteur Diplômé Ingénieur Métallurgiste de l'Université de Liège, d'un MBA de Kellogg NWU et d'un DBA de Dauphine. Aujourd'hui Professeur au département de stratégie de l'EDHEC et un spécialisste en Supply Chain et en technologies disruptives. Il dipose de 25 ans d'expérience en conseil (BA&H, McKinsey) et en entreprise (PepsiCo, GSK). Bibliographie : [1] “J.P. Morgan Creates Digital Coin for Payments | J.P. Morgan.” [Online]. Available: https://www.jpmorgan.com/global/news/digital-coin-payments. [Accessed: 08-Dec-2019]. [2] “MADRE: a Banque de France blockchain project,” European Payments Council. [Online]. Available: https://www.europeanpaymentscouncil.eu/news-insights/insight/madre-banque-de-france-blockchain-project. [Accessed: 08-Dec-2019]. [3] “ING executes first commodity trade transaction on Komgo | ING WB.” [Online]. Available: www.ingwb.com/themes/distributed-ledger-technology-articles/ing-executes-first-commodity-trade-transaction-on-komgo. [Accessed: 08-Dec-2019]. [4] BBVA, “‘The Banker’ recognizes BBVA’s blockchain corporate lending platform,” NEWS BBVA, 17-Sep-2019. [5] BBVA, “BBVA signs world-first blockchain-based syndicated loan arrangement with Red Eléctrica Corporación,” NEWS BBVA, 07-Nov-2018. [6] “Zero ETH is Exchanged in 88% of Ethereum Transactions,” longhash. [Online]. Available: https://longhash.com/news/zero-eth-is-exchanged-in-88-of-ethereum-transactions. [Accessed: 13-Dec-2019]. [7] World Bank; Cambridge Centre for Alternative Finance, “Regulating Alternative Finance : Results from a Global Regulator Survey,” World Bank, Washington, DC, Oct. 2019. |
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