La crise sanitaire et les confinements successifs ont contraint la plupart des entreprises à s’adapter à cette nouvelle donne. Certaines ont même fait évoluer leur business model, changeant carrément de cible, de produits ou de mode de distribution. Mais cette « réinvention » est-elle durable ?
Cinq entrepreneurs témoignent
Le Covid est venu renforcer une double conviction déjà largement partagée, en « temps normal », par les chefs d’entreprise : la digitalisation et l’agilité leur seront toujours plus indispensables à l’avenir, s’ils veulent voir croître et embellir leur activité. Mais tous sont heureux, sur le plan personnel et sociétal bien sûr, mais aussi professionnel, d’apercevoir le bout du tunnel. Si la crise sanitaire a décuplé leurs capacités d’adaptation, ils en ressortent armés de business models plus solides, parfois hybrides entre « l’avant et l’après », parfois dotés d’un volet additionnel, mais jamais pivotés de 180°.
BULKEE-SHOP RÉDUIT L’EFFORT CLIENT
Safir Hanafi (MSc IPD 15) est manager de l’incubateur et de l’accélérateur de NEOMA Business School. À ce titre, il a suivi avec un vif intérêt l’adaptation des start-up nées dans ce creuset de l’entrepreneuriat. Celle de Bulkee-shop.com, épicerie en ligne imaginée par Vincent Rouxel (BRM ECAL 20) et Dimitri Le Hénaff (BRM ECAL 20), deux étudiants du campus NEOMA de Rouen, lui apparaît emblématique de « la réduction de l’effort client déjà à l’œuvre depuis de nombreuses années dans la relation vendeur-acheteur. » À l’origine, Bulkee joue la carte du zéro déchet et du locavorisme, qui suscitent un intérêt croissant chez les consommateurs. La start-up se fournit en produits frais, sélectionnés dans un rayon de quelques dizaines de kilomètres, et les propose en vrac dans des points de collecte proches de ses clients. Eux ont fait leurs courses en ligne auparavant, en se baladant dans les rayons virtuels de la plateforme Bulkee. Mais confinement oblige, la livraison rapide, à domicile, à des clients à mobilité réduite – souvenons- nous : un kilomètre autour de chez eux au moment le plus dur des restrictions – va devenir la règle. Respectueux des distances et gestes barrières, le livreur dépose sur le pas de porte la commande préalablement réglée en ligne, attend que son client la récupère et échange avec lui un petit signe pour s’assurer qu’elle est conforme avant de repartir. « Ne pas oublier de tisser ce lien, même ténu, avec le consommateur est essentiel », souligne Safir, qui relève que Carrefour a lancé en début d’année dans plus d’une centaine de ses hypers les « Blabla-caisses, où les collaborateurs de l’enseigne prennent le temps de discuter avec les personnes qui le souhaitent, récréant de la proximité. » Une innovation qui parle à de nombreux consommateurs, isolés en période de Covid.
par Patrice Theillout
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