Environ 15 % des diplômés d’école de commerce abandonnent leurs terrains de jeux naturels (les grandes entreprises). Nous avons rencontré cinq alumni et autant d’histoires différentes, mais qui toutes s’ouvrent au même sésame : « il était une fois… » l’envie de changer de vie !
"Et pourtant j'ai fait une école de commerce !"
Anne Prevost-Bucchianeri est professeure associée en comptabilité, contrôle et affaires juridiques, et François Pottier professeur associé en comptabilité et contrôle de gestion.
Dans leur ouvrage, ils explorent ce qui pousse de nombreux Alumni à se détourner des grandes entreprises, des cabinets de conseil ou du secteur de la finance pour devenir artisan, commerçant, agriculteur ou profession libérale. Sans surprise, la quête de sens et l’équilibre vie professionnelle/vie privée arrivent en tête des motivations de ces reconvertis…
Pourquoi ce livre ?
Anne Prevost-Bucchianeri – Il est né d’un constat. Sur 100 étudiants diplômés d’école de commerce, environ 15 vont se détourner par la suite de ce que l’on considérait jadis être leur « voie royale » de carrière – grandes entreprises, monde de la finance et du conseil – pour exercer le plus souvent une profession indépendante, dans laquelle ils seront pleinement maîtres de leur destin. Il nous a semblé important de comprendre leurs motivations, d’autant qu’ils sont peut-être les précurseurs d’un mouvement plus radical au sein de leur communauté, qui interroge forcément notre enseignement. Une trentaine de diplômés ayant effectué ce « grand saut » ont témoigné. Des experts de multiples disciplines viennent éclairer leurs récits.
Quel est le profil de ces diplômés « originaux », explorateurs de nouvelles pistes professionnelles ?
François Pottier – Ils se divisent en deux grandes catégories. Il y a ceux qui se reconvertissent, après un début de parcours disons « classique », et ceux qui écoutent leurs envies – voire l’appel impérieux de leur vocation – dès leur diplôme en poche. Leur dénominateur commun ? La quête de sens. Pour la plupart, les « reconvertis » auraient pu continuer d’exercer leur profession initiale mais expriment Éditions Management et Société – août 2020 NEOMA ALUMNI mag SETEMBRE 2022 — 49 — tous, à des degrés divers, un déficit « de bonheur au travail ». Nombreux sont ceux qui aiment leur métier mais déplorent une forme de déshumanisation qui imprègne les organisations importantes. Aux enseignes leaders de l’audit et du conseil en stratégie, par exemple, ils préféreront le cabinet implanté sur un territoire, qui leur offrira plus d’autonomie, de responsabilités, de prise d’initiative, un accès plus direct à leur hiérarchie et un suivi des clients sur la durée. Les grandes entreprises sont souvent perçues également par ceux qui les quittent comme des lieux où s’exacerbe l’esprit de compétition et où l’équilibre vie professionnelle/vie privée est difficile à maintenir. Enfin, dans certains cas, ils ne sont plus en accord avec les valeurs ou le mode de management de l’entreprise. Ce désalignement entraîne leur départ. Une jeune collaboratrice d’une enseigne du secteur de la mode, qui témoigne dans notre ouvrage, a fait le constat amer que le « green washing » était à l’oeuvre et que la véritable stratégie de l’entreprise consistait à fabriquer à des coûts très bas. Elle a démissionné.
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